MB : Moi, vis-à-vis des autres, je n’ai pas étudié à Zurich, comme Vacchini. Je venais d’un contexte culturel très diffèrent. J’étais le plus jeune, j’ai étudié à Venise ; et dans un certain sens j’ai pu amener les problèmes théoriques – les problèmes d’urbanisme, les problèmes de la ville – les problèmes de l’architecture pas comme construction. A Zurich il y avait une culture très pragmatique ; et c’est là que je suis rentré en contact avec cette génération qui était un peu plus vieille que la mienne. Mais on a eu beaucoup de feeling, et d’amitié évidemment, complicité aussi. Et donc Vacchini, je l’ai rencontré dans ce cadre-là. Avant il était... pas seulement lui, mais tout le reste aussi, ils pensaient que l’architecture, que la construction c’était un métier à faire pour répondre à des questions ; après on a commencé [d’explorer], pas seulement moi-même, la culture que j’ai rencontré à Venise. Benevolo avec son histoire et après, plus tard, j’ai commencé à rencontrer Le Corbusier, après Louis Kahn, après Carlo Scarpa et donc ils regardaient vers ce groupe ; ce n’était pas une école, c’était simplement une culture architecturale qui s’est formée pendant cette génération. Ça c’était un peu le rapport avec Vacchini avec lequel on tenait un rapport d’amitié aussi parce qu’il était très amusant, puisqu’il aimait la belle vie… mais lui il était attentif, intelligent. C’était un des rares architectes qui venait chez moi à voir qu’est-ce que j’étais en train de faire…
SS : Vous habitiez où à l’époque?
MB : Tout près de Mendrisio, à Genestrerio. Il venait de Locarno, où on se rencontrait en différentes occasions le dimanche… c’était un rapport d’amitié. Donc c’est assez intéressant de comprendre – pour donner une clef de lecture, comment le monde nordique de Zurich a découvert les problèmes de l’architecture à travers la culture italienne.
SS : Qui comprenait une autre échelle de la ville…
MB : Qui comprenait les problèmes théoriques de l’architecture, l’histoire de l’architecture – il y avait Insolera, Benevolo, des architectes comme Gardella et après c’était l’occasion de Le Corbusier à Venise dans les ’65 – tout une série d’éléments qu’indirectement l’école de Venise cherchait à soulever ; cette école était la meilleure à ce moment-là dans la culture européenne. On était encore avant les ’68, avant la contestation des étudiants ; mais les problèmes étaient déjà dans l’air de la culture. Voilà – pour donner un peu le cadre.
Mario Botta naît en 1943 à Mendrisio. Après un apprentissage de dessinateur en bâtiment dans le bureau d'architecte Carloni et Camenisch à Lugano, il fréquente le lycée d'art de Milan. Il étudie l'architecture à Venise avec Carlo Scarpa et Giuseppe Mazzariol et obtient son diplôme en 1969. Il effectue durant cette période un stage dans le bureau d'architecte du Corbusier à Paris et rencontre Louis I. Kahn. La rencontre avec ces deux importants représentants du "Brutalisme" le marque fortement. En 1970, Mario Botta ouvre son propre bureau d'architecture à Lugano et construit des maisons familiales au Tessin. Il réalise ensuite divers projets dans le monde entier ; parmi les 300 bâtiments qu'il a signés, citons le Museum of Modern Art de San Francisco, la galerie Watari-um à Tokyo, la médiathèque de Villeurbanne, la cathédrale d'Evry, le musée Jean Tinguely à Bâle, la synagogue et le centre du patrimoine hébraïque Cymbalista à Tel Aviv, le Centre Dürrenmatt à Neuchâtel, les bâtiments administratifs Tata CS à New Delhi et à Hyderabad, l'église Santo Volto à Turin et le centre de "bien-être" d'Arosa. Parallèlement, Botta enseigne dans le monde entier, entre autres à l'Ecole Polytechnique fédérale de Lausanne et à l'Accademia di Architettura de Mendrisio, qu'il a co-fondée. Il a reçu de nombreux prix internationaux, comme le Merit Award for Excellence in Design by the AIA pour le Museum of Modern Art de San Francisco, le prix 2005 de l'Académie d'architecture internationale de Sofia pour la tour Kyobo de Séoul et le European Union Prize for Cultural Heritage Europa Nostra pour la reconstruction du Teatro La Scala de Milan. Mario Botta contribue à enrichir la vaste littérature consacrée à son œuvre en étant auteur lui-même de nombreux articles et monographies sur l'architecture. (www.bundesmuseen.ch)
Collègue et ami de Livio Vacchini depuis les années ‘1960.